Explorez le périple des émigrants du Fujian: de leur province dynamique en Chine jusqu’en France, un voyage jalonné d’aventures, de transformations économiques et de défis personnels. Découvrez l’histoire et les renseignements principaux sur cette diaspora chinoise en France. .
Le Fujian est une province littorale et montagneuse au sud-est de la Chine, et fait partie des trois provinces historiques d’émigration vers le monde (Zhejiang, Fujian et Guangdong). En 1990, les recherches établissent qu’au moins 7 millions de personnes de la diaspora chinoise dans le monde étaient d’origine de la province du Fujian — représentant presque un tiers de la diaspora à cette époque — avec une forte présence dans les pays d’Asie du Sud. Les migrants venant de Fujian avant 1995 étaient davantage urbains, pour la moitié issus de deux grandes villes, Changle et Fuqing, et avaient un niveau d’éducation relativement élevé (43 % avaient fini leur lycée, et 11 % avaient eu droit à des formations universitaires).
Pour une incursion dans l'histoire, évoquons le site de Tulou, un ensemble singulier de maisons en terre de plusieurs étages, circulaires ou carrées, pouvant héberger jusqu'à 800 personnes. Baptisées tulou, ces constructions, édifiées entre les XVe et XXe siècles, ont été inscrites au patrimoine mondial de l'UNESCO en 2008.
Le Fujian ne rentre pas dans la catégorie des régions les plus pauvres de Chine ; au contraire, la région bénéficie même d’une dynamique de développement rapide dès la fin des années 1970, suite à l’ouverture économique de la Chine en 1978. Le contexte politique facilite la migration au Fujian : en 1970, des réformes économiques sur la relaxation du Hukou (système d’identification du citoyen chinois), une mise en œuvre de contrats à durée déterminée favorisant la mobilité à l’étranger dans les années 1980 et le relâchement du contrôle et des régulations migratoires redynamise la tradition d’émigration. Disposant d’une situation géographique favorable, la province du Fujian attire l’attention et bénéficie des investissements en provenance de l’État chinois et de l’étranger. De manière générale, les raisons des migrations du Fujian ne résident pas tant dans des forces majeures (fuite politique ou guerre) mais restent liées à des facteurs économiques, comme la vague de migration du Zhejiang.
On observe des profils plus aventuriers, désignant des personnes voulant voir le monde, et changer de vie ; d’autres profils plus “naufragés” qui désignent les classes ouvrières ayant raté le coche de l’essor économique et ne pouvant plus accéder à certains postes site au changement du marché de travail en Chine (marchandisation de l’éducation supérieure, demandes du marché de l’emploi). Cet accroissement des inégalités en Chine pousse les classes les plus modestes à s’enrichir à l’étranger. Dès 1995, ces migrants concernent davantage des hommes, à la différence des émigrés chinois en général ou le ratio homme/femme qui tend à s’équilibrer en faveur des femmes. Ce sont également davantage des jeunes, issues du milieu rural, avec un niveau d’éducation peu élevé et souvent un travail précédent dans le secteur des services. Ce sont d'importants facteurs dans la migration des Fujian entre 1982 et 2000. Ces originaires de Fujian, tout comme les migrants de Wenzhou au départ, ont plutôt un statut de prolétaires : travail de nuit, pour différents patrons, travail peu qualifié, voire misérable au départ.
La présence de Chinois du Fujian en France est observée d’abord en 1917, parmi les travailleurs chinois recrutés durant la Première Guerre mondiale. L’accord du traité de Schengen (1985) pour passer par les pays qui acceptent plus facilement les travailleurs non-qualifiés tels que le Portugal, l’Italie, et l’Espagne est utilisé par certains migrants de Fujian pour atterrir ensuite en France. Les migrations des Cchinois du Fujian vers la France débutent réellement au milieu des années 1990, sur le modèle des personnes originaires du Zhejiang. Il existe peu d’estimations récentes du nombre de Fujian en France. En 2005, les travaux de collecte par l’ASLC (Association d’assistance scolaire linguistique et culturelle) montraient que les Cchinois du Fujian forment le deuxième groupe des nouveaux migrants chinois le plus important en France (11 % soit presque 2 000 personnes), après les personnes originaires du Zhejiang (5).
Les métiers occupés ressemblent à ce qu’il se passe chez leurs voisins les migrants de Zhejiang, soit des métiers de la confection et de restauration. Néanmoins, les générations nouvelles tendent à bénéficier plus simplement de l’ascenseur social, dès lors que leurs parents leur confient leur business précédemment établi. Enfin, les Cchinois du Fujian disposent de leurs associations : l’Association du Fujian en France et l’Association générale des compatriotes de Fujian en France, mais d’une activité et médiatisation relativement limitée par rapport à d’autres communautés chinoises jusqu’à présent.
Sources
Liang Z., (2001), Demography of Illicit Emigration from China: A Sending Country's Perspective,
Liang Z., Morooka H., (2004), Recent Trends of Emigration from China: 1982-20001,
Zhu, G. (1990). “A probe into reasons for international migration in Fujian Province”,
Site de l’ASLC (Association d’assistance scolaire linguistique et culturelle),
Tulou du Fujian, UNESCO WORLD,